Ça fait longtemps que je nourris une forme de réflexion (dans l’action) sur et à propos des réseaux sociaux. Ça fait longtemps que j’ai personnellement choisi la ligne du compte unique, où je suis moi-même en tout temps. Par exemple, sur Twitter, je diffuse, parfois beaucoup, lors de colloques où j’ai la chance d’être présent, question d’alimenter les absents, je diffuse parfois dans le cadre de ma profession, en partageant de l’information, ou encore en échangeant, en discutant avec d’autres collègues éducateurs, et enfin, parfois à titre personnel, juste pour jaser!
Tout ça avec le même compte : ce que j’appelle (pour moi, mais je respecte les choix différents du mien) la schizophrénie web, non merci, pas pour moi.
Et ainsi, au fil des ans — j’étais sur les babillards électroniques (Agora, les plus vieux se souviendront) dans les années 90, puis sur la blogosphère, twittosphère, etc., depuis 10 ans —, je me suis bâti un réseau sur le web.
Avec la mort de Jean Lapierre et avec tous les témoignages qu’on a entendus, tous empreints profondément de l’émotion innommable des circonstances de la tragédie tout aussi innommable, j’ai nourri ma réflexion à propos de cet homme très apprécié (et cette appréciation n’est pas du “fake posthume” qu’on voit parfois à la mort de certains!). Il m’apparaît clairement que Jean Lapierre, fortement présent sur les réseaux sociaux (Twitter et Facebook), était vraiment un gars de réseaux. En fait, les réseaux sociaux, pour lui, n’ont été que la continuité de son réseautage amorcé et construit depuis des décennies, en étant simplement proche des gens, les “petits” comme les grands. Ce genre de réseau se construit une personne à la fois, de façon authentique et sincère. Ma conclusion est qu’un tel réseau ne peut se construire sans qu’on s’intéresse profondément aux gens qui composent et qui forment ce réseau, un tel réseau ne peut exister sans ce que je nomme les échanges véritables et humains.
Et ça m’a naturellement amené à la façon avec laquelle les “gestionnaires de communautés” —comme le veut le titre consacré à cette fonction de plus en plus présente dans les entreprises— sont parfois présent sur les réseaux sociaux. [Ici, je me dois de souligner le très bon texte de Sylvain Grand’Maison où il aborde cette question, principalement son point 2]. Quand tu es présent sur les réseaux sociaux juste pour faire ton “pitch” de vente, sans jamais échanger avec les gens, quand tu ne fais que diffuser tes lignes et tes phrases pré-écrites, ne t’attends pas à développer un réseau signifiant. Il y a peut-être quelques méga-vedettes qui peuvent parfois le faire et être suivies par des milliers de personnes, mais encore ici, on ne parle pas d’échange et de discussions avec les gens. Ça reste alors une “machine” qui débite son information à coup de 140 caractères à la fois, mais on ne peut pas parler de véritable réseau. Dans un véritable réseau, les mots, les informations, les opinions, les discussions circulent dans les deux sens. Si tu veux bâtir un vrai réseau, implique toi, échange avec les gens, les êtres humains, sois toi-même, authentique, vrai, point final. Alors pour une entreprise, ça peut vouloir dire que la personne responsable de la communication aux réseaux s’implique plus, en défendant bien sûr la ligne de pensée de son entreprise, oui, mais il faut alors qu’elle y croie, qu’elle y adhère et qu’elle s’implique en tant que personne humaine, qui échange avec d’autres humains. J’ai déjà croisé sur les réseaux de telles personnes, mais pas en si grand nombre que ça, parmi les gens de communications !
Pour en revenir à Jean Lapierre, en terminant, je dirais que sa façon de faire réseau, sa façon d’être en réseau est que, finalement, l’homme était réseau. Être réseau tout court. Personnellement, j’en retire une sorte de “modèle” que j’apprends à connaître à titre posthume (je n’ai malheureusement jamais rencontré ce personnage qui n’en était pas un, parce que vrai en tout temps), et qui me montre que, finalement, je pense avoir choisi la bonne route en privilégiant constamment le contact humain avant toute chose, sur les réseaux sociaux comme dans la vraie vie.
P.S.: Mes sympathies aux gens de la famille Lapierre qui restent, ainsi qu’à ses (nombreux) amis…