Cet après-midi, en journée pédagogique, présentation du nouveau modèle de bulletin chiffré, proposé par la Commission scolaire, modèle à être ajusté localement, ajusté très légèrement, la marge étant très mince, dû au délirium très mince de notre grande et sainte patronne qui a LA vérité surtout en entrevues… Lapidez-moi, j’exagère toujours un peu ! Un peu. Si peu…
On aura au moins convenu, comme plusieurs (dont le prof malgré tout dans ce billet) que des compétences, ça ne s’évalue pas en notes, pas avec 100 échelons dans l’échelle; ce serait l’absurdité consacrée. Je veux bien croire qu’on joue malgré nous à une «game» politique, mais quand même !
Là où ça se complique, c’est lorsque l’on traduit ces cotes en notes, en nombres (les chiffres étant de 0 à 9, point final, bon !) La meilleure aberration consiste en la cote E (cote attribuée potentiellement, éventuellement à un élève qui n’aurait rien fait) convertie au résultat de 32. Ça vient d’où, ça ? On ne sait pas… Puis tout à coup, je m’exclamai, probablement pour détendre une atmosphère beaucoup trop tendue à force de voir autant d’incohérences en si peu de temps : «Ben voyons ! Ils ont oublié de convertir les unités de mesures. 32°F, ça fait 0°C !»…
LE problème avec l’évaluation des compétences, c’est celui de l’incompréhension assez générale (chez quelques profs quand même encore trop nombreux, chez beaucoup de parents et, visiblement, chez la ministre) de l’évaluation holistique (voir ici : holisme). Le prof masqué en parlait dans un billet récemment. (Voir ici.)
Alors on a tout ça, ainsi qu’une ministre qui joue à acheter des votes à peu de frais en suivant une quelconque vague aux dépends de la cohérence, votes essentiels à un gouvernement minoritaire qui pourrait aller en élections n’importe quand… On a tout ça et plus encore… Et ce qu’on aura ne me laisse guère d’espoir pour les prochaines semaines ou les prochains mois. On aura des rencontres de parents fin novembre où nous devrons nous débattre face à l’incompréhension créée de toutes parts. Parfois, comme certains collègues, j’aurais le goût de dire : allez donc demander à la ministre qui a eu cette idée du bulletin chiffré, mais d’un autre côté, je me sens mal de ne rien expliquer aux parents de mes élèves. Comment expliquer l’incohérence ? Comment expliquer une incohérence ? L’évaluation ne devrait-elle pas appartenir aux profs à 100% (Ai-je dit pourcent ?) Encore un empiètement du politique sur les compétences professionnelles des enseignants ?
Le problème avec les nombres (une adjointe disait ça cet après-midi, vers 16h40), c’est leur signification culturelle différente de celle qu’on veut donner au bulletin chiffré des compétences… La double signification des nombres amènera forcément des distorsions. Or un bulletin se devrait d’être une communication claire !…
Que de travail à faire encore, à la suite de ce bonbon politique, véritable cadeau de Grec dans la mare de l’éducation…
Vivement un peu de repos (je ne peux dire correction, je ne sais plus comment la faire…). C’est la fin de semaine !
MISE À JOUR : 2007-11-04–23h00 :
Un billet très intéressant ici, qui vient d’un non-prof en plus !
Tout ce débat sur le bulletin prend une tournure un peu surréaliste. Vous avez raison de souligner qu’il est absurde que E équivale à 32%.
Sauf que je me questionne quand vous affirmez qu’on ne peut pas évaluer une compétence en chiffre. Pourquoi?
Si l’échelon en notes se résumait à 20, 40, 60, 80 ou 100, le débat serait-il réglé? Bien sûr que non. Pourtant, quelle est la différence abec A, B, C, D ou E?
Lettres,chiffres, petits bonhommes Charest, je m’en contrefous! Ce ne sont que des symboles pour transmettre des informations aux parents. Tout cela n’est qu’un débat réducteur. C’est ce que l’on mesure qui importe, c’est comment on détermine qu’un élève a atteint les objectifs qui importent. (Et en passant, comme certains profs estiment qu’il faut toujours évaluer un élève par rapport à lui-même, on n’est manifestement pas sorti du bois…)
Au-delà des chiffres et des lettres, on dirait que personne ne s’est aperçu que le bulletin a beaucoup perdu de son aspect descriptif avec la reformulation des «volets» mesurés. Rien que ça!
Par ailleurs, lorsque vous parlez d’évaluation holistique, pour en avoir discuté avec une pro de ce mode de correction, celle-ci demande des heures et des heures, non seulement de perfectionnement, mais aussi de mise à jour, de «recalibrage».
On est très loin de cela actuellement et j’ai très hâte qu’on trouve une solution qui rallie tout le monde parce qu’on a bien d’autres problèmes sur les bras actuellement.
Cher prof masqué, la compétence en chiffres, effectivement, c’est possible. Vous avez raison de le mentionner ici, car, quand j’ai écrit mon billet, j’ai tourné un peu les coins ronds…
Sauf que les chiffres ou les nombres ont des significations historiques et représentent dans l’imaginaire collectif autre chose : une quantité. Or, les compétences doivent, à mon humble avis, se mesurer en terme de qualificatifs. L’échelle doit être qualitative, ou plutôt, les grades de cette échelle doivent être présentés de manière qualitative, ce qui est plus difficile à faire avec des nombres.
Donc vous avez raison de dire qu’on perd au change en abrégeant les libellés des compétences en plus… Décidément, on ne s’en sort pas du tout, on s’enfonce dans un tas de détails. Vivement une loi sur la clarté… du bulletin !
Pour ce qui est de l’évaluation holistique, c’est vrai que ça prend du temps et qu’il faut régulièrement faire des échantillonages à l’interne pour se réguler, etc. Je le sais très bien, car déjà fait partie d’un comité “x” de l’école, où on évaluait des projets d’élèves de cette façon. Échelle finale ? de 1 à 7, puis plus tard de 1 à 4 (eh oui, des chiffres), mais avec des libellés long “comme ça” et des commentaires des évaluateurs pour chacun des critères, etc. Mais par la suite, les choses se gâtaient inutilement, car il fallait faire le total des “1 à 4” et ramener le tout sur 100 via une échelle sortie d’on ne sais où… Je soupçonne la ministre de s’être inspirée chez l’OBI…
Sylvain: Vous n’êtes pas loin de la vérité. Avez-vous vu tous les liens qui existent entre le programme de formation actuel et le PEI? Des collègues chez nous qui ont fait le PEI trouvent même que la réforme, c’est de la tartinade à côté de cela.