La langue – tout un plat !

 

Langues de porcOn dirait ces jours-ci que le Québec vient de se réveiller à propos de quelques changements (oui, certains les qualifient de majeurs) apportés à la langue française il y a déjà quelques années de cela (en 1990 pour être plus précis) et dont on retrouve des traces dans un document, (miniguide) placé ici (PDF), entre autres. (Le site à visiter est ici.)

Avant de crier haro sur le baudet, il faudrait peut-être se rappeler ce qui arrive avec les langues qui ne subissent aucun changement pendant des années : ces langues meurent ! Or, le français est une langue encore vivante, que je sache, alors il serait bien de considérer qu’elle puisse évoluer dans le temps, même lentement, si on veut qu’elle demeure bien vivante et non sclérosée dans une sorte de nostalgie passéiste et figée.

Non pas qu’il faille accepter tout, n’importe quoi et son contraire (si ça se peut !), loin s’en faut, mais considérer comme possible une certaine évolution dans l’orthographe de CERTAINS mots et dans l’application de certaines règles de grammaire, le tout vers une recherche d’une plus grande cohérence, même si cette cohérence, on ne la voit qu’en prenant assez de recul pour embrasser quelques siècles à la fois !!! Voyons deux exemples.

Personnellement, j’avoue avoir tiqué quand j’ai vu “ognon” au lieu du “oignon” habituel, réconfortant pour mes yeux, pour mes habitudes, etc. Mais j’ai bien vite été obligé de me rendre à l’évidence: ce mot s’est déjà écrit “ognon” en 1275, selon Hortensia68 et le Robert historique. On a donc eu, il y a plus de 7 siècles, “ognon”, qui est par la suite de venu “oignon”, pour redevenir “ognon” à partir de maintenant. 

De la même façon, on a eu “savoir” il y a plusieurs siècles, qui a été changé en “sçavoir” par un scribe zélé qui pensait que le mot venait du latin scire, puis qui, quelques autres siècles plus tard, est redevenu “savoir”, plus conforme à l’étymologie véritable de ce verbe qui vient en fait de sapere ! OUF ! (Voir ici pour de plus amples détails: recherche “scavoir” dans la longue page)

Bien entendu, des rumeurs sont colportées depuis déjà quelque temps concernant cette “nouvelle” orthographe, parfois aussi appelée “réforme” de l’orthographe, trop souvent confondue avec la Réforme en éducation au Québec qui n’a RIEN, mais alors là absolument rien à voir avec les quelques changements d’orthographe et de règles dont on parle ici. Par rumeurs, j’entends souvent celle qui dit qu’on pourrait écrire un cheval, des chevals: FAUX votre honneur ! À AUCUN endroit du document précédemment mentionné, il n’est question de modifier le pluriel des mots en -al. Oui, on modifie quelques accents circonflexes devenus depuis longtemps complètement inutiles et autres trucs du genre, mais on ne change pas les fondements de la langue elle-même !

Alors continuons d’écrire notre langue belle avec toute la rigueur et l’application nécessaires et arrêtons de faire une chasse aux sorcières avec pas grand chose en bout de ligne et, surtout, cessons de crier aussitôt que nos petites habitudes chéries sont très légèrement bouleversées pour quelques mots par ci par là. Entre accepter n’importe quoi et subir quelques changements mineurs, il y a un char et une barge de nuances importantes que notre affectif, attaché aux traditions confortables et confortantes (réconfortantes aussi), tente d’occulter et d’écarter du revers de la main : la situation n’est jamais aussi simple qu’on voudrait bien se le laisser paraitre !

En complément :

Lettre que j’aurais voulu écrire et que je cosignerais sur-le-champ 🙂

Discussion chez Christiane Charrette à propos de cette réforme de l’orthographe.