Temps perdu … à compter le temps

CartePunch…ou la carte-à-punchisation des profs 🙁

Ça fait longtemps que le sujet me fait rager, qu’il me dérange profondément de par son absurdité fondamentale, et que, si le ridicule tuait, il serait mort et enterré depuis sa naissance au moins…

Je parle ici de l’entourloupette nationale qui fut un «cadeau» reçu avec une supposée équité salariale obtenue, supposément de force, et avec un bonheur béat de remerciement au bon gouvernement pour faveur obtenue, etc. Quelle faveur ? Je ne suis pas sûr qu’on ait reconnu ce à quoi nous avions vraiment droit. Des ententes alambiquées au superlatif comme ça, on pourrait s’en passer. Quel ri-di-cu-le.

Trêve de préambule, voici ce pourquoi j’enrage chaque année…

Une fois toutes les tâches attribuées aux enseignants, soit l’enseignement comme tel (les cours qu’on donne), les ATÉ (Autres Tâches Éducatives – en présence d’élèves), les TCO (Tâches COmplémentaires – appels aux parents, comités sur lesquels siègent des enseignants, réunions, etc.), sans compter les heures reconnues – mais qui doivent être faites à l’école, sauf les 8 dernières heures pour un total de 40h – de TNP (Travail de Nature Personnelle – lectures, préparations de cours, corrections, etc.), une fois toutes ces tâches attribuées, en nombre de minutes par semaine ou par cycles de 9 jours, selon l’horaire suivi, il nous faut sombrer dans le ridicule d’entrer dans un horaire fixe des tâches à durées variables, qui surviennent la plupart du temps – sauf pour les cours – à des moments variables et d’intensité tout aussi variable !!! La jungle des chiffres décortiqués, des calculs de quantité de non-sens au cube, etc. Et le temps que l’on prend pour remplir et calculer n’est pas reconnu ni déductible, un coup parti dans le ridicule !!!

En plus, les abréviations et autres acronymes peuvent varier d’une CS (Commission scolaire) à l’autre, ou d’une école à l’autre peut-être même…

Au secondaire, nous avons en moyenne ceci :

Enseignement (Autrefois appelé le “A”) : 24 périodes de 75 minutes par cycle de 9 jours. En fait, la véritable moyenne doit se situer à exactement 24,6, budgétairement parlant, pour les administrations des écoles, de sorte que certains enseignants ont 25, 26 ou 27 périodes de cours au lieu de 24.

ATÉ (Autrefois appelé le “BCD”, qui complétait le “A”) : 4,8 périodes par cycle de 9 jours. (Ou moins, si l’enseignant dépasse 24 périodes de cours: le total A + ATÉ doit donc être de 28,8 périodes par cycle de 9 jours exactement !)

TCO: 10,08 périodes par cycle de 9 jours, dont 4,08 reconnues pour accueil et déplacement, etc.

TNP: 7,2 périodes par cycle de 9 jours pendant 22,22 cycles ou 5 heures par semaine pendant 40 semaines. De ce 7,2 périodes, on doit en entrer 6,2 dans l’horaire, car 1,0 période/cycle est reconnue pour les rencontres de parents aux bulletins, les rencontres de niveaux (10 rencontres par année).

Au total, donc, l’enseignant est réputé travailler 46,08 périodes de 75 minutes par cycle de 9 jours ou, si l’on veut, 32h par semaine à l’école. (La majorité fait plus que cela, c’est d’une évidence même, mais il faut calculer tout ça quand même et l’entrer dans un horaire tout aussi fictif, car il correspond très rarement à la réalité.)

À cela s’ajoute 8 heures par semaine de TNP reconnu pour être fait à la maison. (En cette ère où le télétravail est de plus en plus répandu, il apparait quand même un peu (!) anachronique de comptabiliser le TNP fait à l’école et celui fait à la maison: distinction bien inutile à mon avis !)

Tout le reste doit être fait à l’école obligatoirement. Ne manque que la carte à punch !

Toutes ces heures doivent être passées à l’école pour prouver ainsi qu’on mérite d’avoir le salaire désormais équitable. Lors des négociations de cette équité (quel drôle de concept), les enseignants avaient été invités à faire la preuve qu’ils travaillaient environ 40 heures par semaine au total, car les profs, ça fait bien plus que donner des cours. Et bien plus aussi que les préparer et faire les corrections des piles de travaux tout au long de l’année…

Là où le bât blesse, c’est que la très grande majorité des enseignants se donne généreusement à l’ouvrage et qu’à chaque fois qu’on tente de comptabiliser ce coeur qu’on met à l’ouvrage, l’effet en est un de grande démotivation… S’il y a quelques enseignants qui ne se forcent pas, les directions ont simplement à les avertir, les encadrer, eux. Pour le reste, c’est une insulte à notre professionnalisme, une logique “ouvrière” (probablement héritée des syndicats des années 1960 ! – Je n’ai rien contre les ouvriers ou les usines, mais l’école n’est PAS une usine, tout simplement, quoique parfois, à la regarder, on pourrait la confondre avec une usine à notes, ou à résultats à entrer dans un éventuel palmarès !!!)

Un autre élément irritant au maximum, ce sont les quelques congés de maladie que plusieurs prennent pour, entre autres, corriger les interminables piles de travaux d’élèves. Déjà cette réalité, juste comme ça, est un pur non-sens en soi. Je connais des enseignants qui seraient prêts à monnayer ces congés de maladie, comme ça se fait ailleurs et comme ça s’est déjà fait en enseignement avant 1996. Cette année-là, on a aboli la monnayabilité des congés de maladie pour les enseignants permanents (Les précaires, vu la fin de leur contrat, se voient monnayer ces congés en juin, puisqu’ils n’ont plus de lien d’emploi avec la CS), les congés étant, après une soustraction d’une journée, versés dans une banque qu’il sera éventuellement possible d’écouler un jour… Pour avoir déjà vu des gens dans ce système-là il y a près de 20 ans, qui voulaient écouler une demi-année accumulée, voire plus, se faire refuser un tel “congé”, les profs se disent que les règles auront bien le temps de changer 3 fois avant que la retraite n’arrive, de sorte qu’on perdra sûrement cette banque, etc., de sorte qu’ils prennent au fur et à mesure ces congés, chaque année.

Là où le ridicule tue (!), c’est lorsque l’on applique l’horaire “fictif” mentionné plus tôt à cette banque de congés. Un enseignant qui est absent pour donner son cours doit être remplacé, normal ! Un enseignant voit à la préparation des périodes où il s’absente, à moins d’un grave accident sur le chemin du boulot ou d’une maladie subite, etc. Sinon, pour un rendez-vous médical, par exemple, la période se planifie. Les autres tâches, comme les ATÉ, TCO ou TNP, sont reprises à d’autres moments dans la semaine ou le cycle de 9 jours; encore là, normal, car il faut bien que “la job se fasse” d’une manière ou d’une autre ! C’est lorsqu’on coupe une demi-journée pour une seule période de cours que l’illogisme apparait: situation d’autant plus questionnante pour une demi-journée où l’enseignant n’aurait rien d’inscrit à son horaire, autre que la période de cours… Etc. Vous voyez le genre de manque de logique 101…

Bref, si on se met à baliser trop de détails juste pour satisfaire Pierre, Jean, Jacques, son père et sa mère, on arrive rapidement à ce genre d’illogisme institutionnalisé.

Alors,

  • qu’on laisse donc les enseignants enseigner et faire apprendre leurs élèves en les plaçant dans des situations d’apprentissages pertinentes et signifiantes,
  • qu’on laisse donc les enseignants travailler de façon professionnelle et autonome sans les encadrer avec des trucs alambiqués, ridicules ou simplement infantilisants,
  • qu’on laisse donc les enseignants passionnés se développer et faire se développer leurs élèves au rythme des passions de chacun,
  • et qu’on encadre les quelques uns qui restent !

Merci !

P.S.: Ah oui, j’ai oublié de mentionner, pour les chiâleux de ce monde, que les profs sont payés seulement 200 jours par année, mais que, depuis la fin des années 1990, le tout est réparti sur 260 jours, de sorte que les profs moins prévoyants reçoivent un montant (déjà travaillé) pendant leurs «vacances» d’été qui se trouvent, techniquement, à être à leurs frais… Alors mieux vaut en être informé également avant de conclure trop rapidement 😉 !

Évolutions – Révolutions – Que choisir ?

Vendredi soir dernier, se tenait à Québec un TweetUp Édu (TweetUp = réunion de gens présents sur Twitter, mais réunion en personne, généralement autour d’une bière ou autre breuvage du genre, dans un lieu où l’on peut discuter tranquillement de choses et d’autres, refaire le monde à l’occasion, échanger en temps réel tout en mentionnant quelques trucs au clavier, car après tout, les “twitteux” sont un peu hyperactifs du clavier, non ? / Édu, quant à lui, signifie Éducation / Donc, au final, une réunion de twitteux qui oeuvrent en éducation pour la plupart, ou qui s’y intéressent grandement…)

okpoint-vert_vhnPersonnellement, je n’ai pas pu assister à ce TweetUp au cours duquel, étrangement, presque personne n’a tweeté/gazouillé, ce qui est quand même un peu-beaucoup étrange pour une réunion de twitteux, non ? Mais bon, passons, car là n’est pas l’essentiel de mon propos, même si, quand je ne peux assister à un tel événement, j’aime bien avoir une trace, un feedback, un compte rendu, via Twitter, ce que j’essaie toujours de faire moi-même au cours de colloques ou autres non-conférences, comme quand j’ai assisté à Clair 2010, Génération C, etc. L’enrichissement peut alors être mutuel, collectif au sens encore plus large, etc. Plus on est nombreux à discuter, plus ça peut devenir enrichissant, non ? Etc.

Mais là où je veux en venir, c’est à propos d’un début de discussion qui s’est passé non pas sur Twitter, mais chez une amie Facebook qui, comme moi, ne pouvait assister au TweetUp de vendredi dernier.

Comme moi, elle s’est informée en posant des questions, car elle ne voyait presque rien qui transparaissait de ce TweetUp. Puis quelqu’un est arrivé avec un mini-compte rendu d’une discussion sur le système d’éducation qui aliènerait en quelque sorte l’Éducation en général… Disons que ce commentaire Facebook était simplement un résumé très succinct d’une discussion qu’il aurait été intéressant de suivre  en temps réel et que nous devrons sans doute faire à notre tour, nous les absents de vendredi… (Tout ça pour dire que, bien qu’il me manque beaucoup d’éléments de CETTE discussion en temps réel de vendredi, on a quand même pu discuter parallèlement sur Facebook le lendemain !)

Face à ce truc d’aliénation de l’éducation en général, je me permets d’avoir des réserves face à toutes ces révolutions-bulldozers qui ont tendance à trop «tout démolir» pour tenter de rebâtir à partir de rien. «Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme», dit la phrase consacrée. «Il y a toujours place à l’amélioration» est une phrase que j’aime bien prononcer régulièrement, mais de là à toujours tout démolir pour améliorer, il y a un ou plusieurs pas que je ne peux pas franchir. D’un autre côté, il est évident que la théorie des petits pas permet parfois de se satisfaire (ou de se complaire) de trop peu d’évolution, mais je pense que de passer le bulldozer trop souvent ne permet pas d’évoluer non plus. Bref, il y a un équilibre entre l’évolution trop linéairement graduelle et la tabula rasa ! On doit parfois gravir de petites marches et parfois de plus grandes, dans cet escalier de l’évolution qui est tout, sauf une ligne droite du genre “autoroute américaine” !

Le commentaire que je faisais en substance dans la discussion chez mon amie Facebook était le suivant: c’est un peu comme si on avait affaire à un cercle (quelque chose de parfois cyclique, peut-être, je ne sais pas d’où est sortie cette forme géométrique de mon esprit ;-)). Dans un cercle formé par une ligne droite (ou une ligne du temps) recourbée, deux extrêmes sont en fait le même point. Donc, vouloir le statu quo ou vouloir tout jeter par terre et repartir à zéro (deux extrêmes) peut finir par équivaloir au même point sur ce cercle… Alors l’équilibre se situe donc sûrement entre les deux, ce qui nous laisse tout le reste du cercle pour évoluer, créer, imaginer un lendemain meilleur, etc.

Bien sûr, l’évolution seule ne suffit parfois pas, il faut parfois ajouter un R, même minuscule, et alors parler de r-évolution… Je l’ai dit, la ligne droite insipide correspond rarement au réel, alors l’évolution n’est pas linéaire elle non plus. Il peut y avoir des soubresauts… Parfois, il peut même arriver qu’on recule pour mieux rebondir vers l’avant par la suite, mais il faut être vigilant dans ce genre d’exercice, comme société, si on veut éviter les écueils de la nostalgie faussement salvatrice, mais vraiment conservatrice !

Par la suite, l’amie Facebook me faisait remarquer que le TweetUp se passait au Cercle… et qu’un cercle qui avance effectue des révolutions… Ayayaye !!! On n’est pas sorti de l’auberge 😉 !

Un cri du coeur

Hier soir, une amie me fait part de l’agression qu’a subie son fils à son école primaire. Triste événement comme il s’en produit malheureusement trop dans une seule journée… Pour son fils, c’est une énième épreuve, puisqu’il y a déjà eu pareils événements, le tout durant depuis plusieurs mois.

Que faire pour que cesse cette violence insensée ? Que faire à part crier sa douleur ?

Voici un cri du coeur écrit par cette mère à qui j’ai offert humblement de publier ici, pour laisser des traces et pour que de plus en plus de gens prennent conscience de l’urgence d’agir... Pour partager sa douleur, aussi…

munch_TheScream

Je suis tombé par terre, c’est la faute à…

De Gavroche, aujourd’hui, mon fils avait l’air dépenaillé : culottes déchirées, mine défaite, visage couvert de larmes. Pourtant, il n’était pas monté aux barricades, brandissant l’étendard rouge de la Révolution. Il n’avait pas défendu de grands principes comme l’égalité, la liberté ou encore la fraternité. Non, il s’était contenté comme tout jeune Québécois de dix ans d’aller à l’école et d’y aller pour en revenir plus instruit, plus socialisé et plus qualifié[1]. Il l’avait fait avec sa bonne humeur et sa naïveté naturelles, persuadé comme chacun de ses camarades de classe qu’il n’y avait rien de risqué, rien de dangereux là.

Et pourtant, ce soir, c’est les hanches couvertes d’ecchymoses, c’est la douleur dans le corps et dans l’âme, c’est l’air triste et abattu qu’il est sorti de l’école, clopinant sur une jambe et grimaçant à chaque fois qu’il posait le pied par terre! Comment ça? Pourquoi? Que s’est-il passé? Il s’est fait agresser. Simplement. Gratuitement. Sans aucune raison sinon d’avoir attrapé un ballon à la place d’un autre. Ce même autre qui, il y a six mois, le rouait de coups de pieds dans le ventre parce qu’il lui avait coupé le chemin! Ce sera quoi la prochaine fois? Parce qu’il y aura fatalement une prochaine fois. Pas que je souhaite du mal à mon fils, vous pensez bien! Non, mais parce que je sais, et ça me fait un mal de chien d’écrire cela, que ça recommencera, encore et encore, que ce soit mon fils la victime ou un autre enfant.

Il y en aura toujours un pour se croire plus fort, pour se croire tout permis, pour violenter un plus petit, un plus doux, un plus inoffensif, parce qu’il n’y a jamais de véritables actions qui sont posées contre ces bourreaux en culottes courtes. Il y a le laxisme des éducateurs, le laxisme des parents, le laxisme de la société qui banalisent les gestes violents, intimidants, harcelants et destructeurs.

J’en ai plus que marre d’essayer de convaincre mon fils de mettre en pratique les cours de karaté que je lui ai payés il y a deux ans et de se faire justice lui-même parce que j’en suis rendue là aujourd’hui, parce que je suis tellement écœurée que ça tombe toujours sur lui que j’en viens moi aussi à prêcher la violence!

La première fois, je me disais et je lui disais : «Ne leur prête pas attention.  Sois plus intelligent qu’eux. Ne tombe pas dans ce piège. Ne réponds pas à leurs attaques. Plains-toi aux adultes responsables. Blablablabla…. » Et puis c’est arrivé une deuxième fois, et puis une troisième, et encore, et encore…

Alors fini les belles paroles, fini la gentillesse, fini la compréhension, fini les plaintes! Fini, F-I-N-I ! Demain, si la direction de l’école de mon fils ne me prouve pas que des gestes concrets, tangibles, réels, efficaces, seront posés pour que la situation change, pour que les petits bums de l’école soient rendus conscients et comprennent enfin qu’ils ne peuvent pas continuer impunément à se comporter comme des cow-boys du far-west, sans foi ni loi, je monterai moi-même aux barricades et je brandirai le drapeau rouge de la Révolution, rouge du sang de mon enfant, rouge comme mon cœur de mère qui saigne, rouge comme ma colère qui gronde en dedans, rouge comme le soleil sur l’horizon en espérant qu’il verra un jour meilleur se lever.

Nathalie Couzon, 20 septembre 2010


[1] Voir les trois missions de l’école québécoise  « L’école a une fonction irremplaçable en ce qui a trait à la transmission de la connaissance.[…] Dans une société pluraliste comme la nôtre, l’école doit être un agent de cohésion : elle doit favoriser le sentiment d’appartenance à la collectivité, mais aussi l’apprentissage du «vivre ensemble». […] L’école a le devoir de rendre tous les élèves aptes à entreprendre et à réussir un parcours scolaire ou à s’intégrer à la société par la maîtrise de compétences professionnelles. http://www.mels.gouv.qc.ca/reforme/pol_eco/ecole.htm

3108 = Blog’s day

Je me rappelle ce 31 août 2006, il y a déjà 4 ans.

J’avais décidé de partir mon blogue moi aussi, comme bien d’autres…

537 billets plus tard et 1293 commentaires (dont la majorité date tout de même de cette époque où on commentait un peu plus qu’aujourd’hui (pas un reproche, là, je fais pareil moi aussi ! – on commente parfois sur… Twitter, par exemple)) après tout ça, donc, voilà où l’aventure m’a mené.

J’ai pu conserver des traces de plusieurs trucs, exprimer des humeurs, des opinions aussi, objectiver souvent différentes pratiques, expériences, réfléchir, etc. Petit à petit le tout s’est tout de même transformé. Aujourd’hui, les billets d’«humeur du moment» sont presque disparus: pour cela, il y a Twitter. Les découvertes partagées rapidement vont aussi à Twitter. Ici, je réfléchis plus longuement, au besoin, comme ça. Je fais aussi parfois des synthèses, mûries en tête pendant quelques semaines ou même mois !

Certaines de ces réflexions m’ont amené à connaitre des gens vraiment intéressants, permettant ainsi de développer de nouvelles collaborations que je n’aurais pu espérer autrement.

L’aventure du web dure toujours – je pense qu’elle est là pour rester -, ce web qui n’a rien de virtuel, bien au contraire, si je regarde les gens concrets que ça m’a fait connaitre réellement, ou sur Skype, en vidéo ou juste en audio, avec le conferencing Adobe Air et autres…

Merci à tous de vos passages par ici. Sachez que j’essaie d’en faire autant sur vos blogues, pour ceux dont je connais l’existence d’un tel blogue (si vous le laissez en lien dans un commentaire, c’est encore mieux ;-))

Au plaisir d’échanger avec vous, de collaborer, de construire ou d’expérimenter un truc ensemble, etc.

Rencontre de voyage

moteldescedresC’était cet été, au milieu de nulle part dans la Vallée de la Matapédia, un soir ordinaire à un motel ordinaire.

Nous sirotions un breuvage, bien calés sur des chaises rondes en plastique des années 1970, devant la porte de notre chambre, quand tout à coup, arrive un homme, seul à moto, une moto puissante, mais pas trop, ni très grosse comme les motos de tourisme ni très petite comme les “scooters” déguisés en motos…

Le gars quitte sa monture, l’air juste un peu fatigué, mais expérimenté – «un gars de bicycle», me dit l’autre, – et nous aborde en nous demandant, en anglais, s’il reste des chambres. Nous lui signifions notre ignorance à ce sujet, vu que beaucoup de voyageurs sont arrivés juste après nous, sans doute aussi tannés que nous de la construction qui nous avait arrêtés à Causapscal pendant presque une heure…

L’homme réussit à avoir une chambre. La conversation commence. Il trouve sa chambre bien trop grande: deux grands lits pour un «cowboy solitaire»…

Notre voyageur a parcouru des milliers de kilomètres jusqu’ici. Il vient de Kelowna, B.C. Il s’est rendu jusqu’à Terre-Neuve, avec un copain californien, en passant par les États-Unis. Le copain voulait revenir en roulant sur des routes de son pays; notre voyageur, lui, dans le sien. Ils font donc route seuls maintenant, chacun de son côté.

L’homme raconte ensuite qu’il a de la parenté au Québec, une belle-soeur originaire du Saguenay qui habite Ottawa, là où il se rend le lendemain (!). Je le trouve bien courageux de rouler autant de kilomètres en un seul jour. Je me prends soudainement à essayer de calculer quel âge peut bien avoir notre homme: 60 ans, 65 ? Pas plus, c’est sûr. Mais lorsqu’il nous parle de son fils le plus vieux qui a 58 ou 59 ans, alors là, les hypothèses de départ ne fonctionnent plus.

Puis la question arrive. Et la réponse de tous nous surprendre énormément: 78 ans !

La surprise passée, nous apprenons que l’homme est veuf depuis plusieurs années, quand sa femme est décédée à 60 ans, d’un cancer.

Silence.

On sent l’émotion tenter une fois de plus de nouer la gorge de cet infatigable trotteur. Juste un instant. L’homme ravale, sans oublier. On n’oublie jamais. On ne se remet jamais d’un tel vide créé par l’absence… La conversation reprend soudainement sur un autre sujet.

Mais ma question demeure, au fond de moi: et si ces voyages masquaient une fuite en avant ? Ou au contraire, s’ils pouvaient apaiser le vide triste que cet homme ressentira toujours quelque part au fond de lui ? Ou quoi d’autre encore…

On ne le saura jamais.

Ces rencontres de voyage sont toujours enrichissantes, même si on ne sait pas tout de ceux qu’on croise, ces moments de partage sont importants. Ils sont humains. On connecte avec des humains qui vivent des choses universelles. Les réseaux sociaux peuvent permettre cela aussi, même si le contact en personne n’est jamais pareil… permettant de ressentir des choses que la lecture seule ne permet pas. Il y a bien sûr les webcams, mais ça non plus, ce n’est pas pareil, même si ça aide à pallier les défauts du texte seul…